La couverture des sols en période hivernale est maintenant bien ancrée dans les habitudes des agriculteurs. Le visage de la campagne a changé en une décennie, notamment en zone céréalière.
Une plante de couvert domine, la moutarde blanche. Cette espèce a effectivement beaucoup d’avantages, quant à sa facilité d’implantation puis de destruction, son coût et sa comptabilité par rapport aux plantes cultivées dans la rotation.
Il existe néanmoins de nombreuses autres espèces qui permettent de répondre à des objectifs divers, ou même de saisir l’opportunité d’une production fourragère supplémentaire.
Commençons par clarifier
D’abord, il semble opportun de clarifier le vocabulaire. On entend parfois les termes « couvert », « CIPAN », « engrais verts », « interculture », « culture intermédiaire », ou d’autres encore. Nous proposons de clarifier : s’il y a un objectif de récolte ou de pâturage, on parlera de cultures dérobées fourragères, si les objectifs sont purement environnementaux et/ou agronomiques, on parlera alors de plantes de services.
Une culture dérobée est une culture !
Elle permet une fertilisation, demande la tenue d’un historique cultural. La culture dérobée fourragère peut aussi être une culture de vente, pour des éleveurs voisins, ou un méthaniseur.
Il est important d’intégrer que l’essentiel de l’impact agronomique d’une dérobée fourragère est amenée par les racines et beaucoup moins par les parties aériennes de la plante. D’autre part, enfouir une matière verte vivante abondante est préjudiciable à la vie du sol.
Se poser les bonnes questions
Le choix des espèces en culture dérobée fourragère nécessite de se poser 9 questions :
Où se situe la parcelle ?
Le pâturage sera plus facile près d’une prairie connue par les animaux, ou près d’un bâtiment d’élevage. Il sera alors facile de leur ouvrir un passage sans créer de stress.
Quel est l'usage prévu ?
Afin de constituer des stocks, il faudra penser à la conception du silo, à l’insertion dans la future ration, voire de synchroniser la date avec d’autres ensilages (ex : silo sandwich avec le maïs).
A quelle date se libère la parcelle de la culture précédente ?
Ce peut être tôt, derrière des légumes de conserve ou orge d’hiver ou escourgeon, ou plus tard, après le 15 août.
Quelle sera la culture suivante ?
Il faut que celle-ci ne soit pas concurrente par rapport à l’eau, ou vectrice des mêmes bioagresseurs. Il faut prendre en compte le risque de repousse. La date de récolte de la dérobée doit être compatible avec la date nécessaire pour l’implantation de la culture suivante
A quelle (s) période (s) souhaite-t-on disposer de la culture dérobée fourragère ?
Dès l’été, à l’automne, tout l’hiver (notamment pour des moutons), au printemps, ou à plusieurs de ces périodes précitées.
Quel sera le mode de destruction ?
Avant même de semer, il faut penser au mode de destruction. Attention au risque de dissémination (par graines qui peuvent germer sur plusieurs années) ou de repousses. Certaines plantes de dérobée sont gélives (attention aux hivers sans gel). Le travail de destruction se fait alors tout seul. D’autres sont détruites du fait de leur exploitation (fauche ou pâture).
Est ce que la dérobée répond à d'autres objectifs ?
En plus de l’objectif de production de biomasse, on peut ajouter d’autres objectifs : favoriser la faune sauvage, favoriser les pollinisateurs, restructurer le sol, piéger ou fixer de l’azote, lutter contre des adventices, répulser les nématodes ou les limaces, lutter contre l’érosion par l’eau ou le vent.
Sous quel climat ?
Les fins d’été et automne se suivent et ne se ressemblent pas ! Et souvent le climat perdure longtemps. Il peut faire chaud et sec ou froid et sec ou froid et humide. Quand il fait chaud et humide, tout pousse bien ! Il convient donc de concevoir des mélanges d’espèces convenant à l’usage, la ou les périodes d’usage et dont au moins un des constituants s’exprimera pleinement dans chacun des scénarios climatiques.
Pour quels types d’animaux ?
Il s’agit généralement soit de bovins soit d’ovins. Mais au sein de ces espèces animales, les besoins peuvent varier en fonction de leur stade physiologique ou de leur croissance. Le fluching pour la lutte des brebis ou la finition des agneaux peuvent être réalisées sur des cultures dérobées riches en énergie comme les brassicacées. Pour les bovins, les génisses, bœufs, vaches allaitantes peuvent se contenter de plantes moins riches et plus abondantes.
Les clés de la réussite
La qualité de la semence
Une semence certifiée est la garantie d’une qualité indemne de la présence de graines d’autres espèces, non vectrice de parasites et/ou maladies et d’une bonne faculté germinative.
La qualité de l’implantation
La période de semis correspond à une période de surcroit de travail pour les agriculteurs. Il est nécessaire cependant de prendre le temps de soigner l’implantation : une terre ameublie en surface, aplanie, un semis dont on maitrise bien la profondeur, suivi d’un passage de rouleau pour optimiser le contact terre-graine.
Finalement, pour effectuer son choix, il faut savoir quelles questions se poser et voir quel matériel est disponible.